Allenc à la croisée de l'histoire de l'Auvergne et du Bas Languedoc

Un dolmen situé à La Prade  et le Menhir du Goulet attestent de pratiques cultuelles funéraires d'une civilisation mégalithique très ancienne datée approximativement du 3 millénaire avant notre ère

Ce substrat social a lentement évolué par empilement de générations autochtones et émigrées venant le plus souvent des régions indo-européennes dès -1200 av. JC. 

Ce fond de peuplement apparaît dès lAntiquité dans différentes sources sous les déterminants « Ligures » (Tite-Live),  Celtes (Strabon), Galates, Gaulois (César, Cicéron).

 

Il s’enrichit des influences grecques et étrusques:

Vers le 7 siècle av. JC, les  Celtes commercent déjà avec les grecs, Phocéens (Massalia, Agathé), et les Etrusques (Lattara) qui installent des comptoirs sur la côte méditerranéenne.  Au Vème siècle l’invention de l’amphore permet d’intensifier le trafic. Il se crée de nouveaux besoins.

Pour les assouvir, les territoires éloignés accentuent l’exploitation agricole et consolident leur implantation pour pouvoir participer aux échanges : fromage et salaison, minerais, bois, poix et laine, contre vin et céramiques. Des mines de plomb argentifère sont recensées sur Allenc, dites d’« Alquifoux » . Un réseau dense de chemins sillonnent la région pour rejoindre l'axe Régordan nord -sud (Nimes-Le Puy), la via Bolena est- ouest ( Le Puy - Rodez). Les drailles de la transhumance ont depuis des dizaines de siècles  relié les pays de Lozère aux plaines du Bas-Languedoc.

Puis le fond indigène s’imprègne des influences romaines autour de l’arc méditerranéen dès -264  pendant  l’épisode des Guerres Puniques.  Les conceptions religieuses et les pratiques rituelles à base d’ambroisie et de champignons hallucinogènes tournent autour de cultes primitifs : culte de l'eau, des sources et des cours d'eau, culte de la déesse mère de tous les dieux, Cybèle, culte du soleil. Une statue noyée actuellement dans le mur de montée à  la tribune de l’église St Pierre évoque ces cultes primitifs. Elle représente une maternité. 

L’esclavage est courant et le quidam se trouve dans la dépendance absolue d’un maître tout puissant. Entre -124 et -121 les Arvernes (nom à l’origine du mot  Auvergne) étendent leur puissance militaire, diplomatique et monétaire jusqu’à Narbonne. Ils subissent de sévères défaites contre l’armée romaine en pleine conquête de la Narbonnaise: Bituitos, fils du roi Luernios est vaincu et capturé. Ce peuple formait une puissante confédération avec plusieurs peuples voisins qui étaient leurs clients ou tributaires dont  les Gabali ( origine du mot Gévaudan). L’entité Arverne est profondément fragilisée et fortement déstabilisée de l'intérieur par les aristocrates terriens qui réclament d’avantage de pouvoir

A la fin de la guerre des Gaules (-58 av. JC.) les Gabales tombent avec les Arvernes sous l'emprise romaine. Leur territoire dépendra désormais de l'Aquitaine 1ère dirigée par un légat nommé par l'empereur et dont la métropole sera Bourges tandis que le Languedoc constituera la Province Narbonnaise directement dirigée par un consul.

Au cours des deux siècles suivants, la romanité pénètre profondément le tissu social. Témoin, la langue qui se construit à partir du parler celte local et du latin et d’où dérivent de nombreux dialectes. Témoin, l'expression des cultes locaux qui s'ajoutent au culte impérial. En plus modeste que le mausolée de Lanuéjols, le cippe de « Gemina » , conservé au musée de Mende, atteste du culte voué aux morts. Il servait de piédestal à la croix de comte :MD/MEMORIAE/GEMINAE/MD/ANTICUS/MARITUS  Interprété comme suit : aux dieux mânes, en mémoire de Gemina, femme très douce, Anticus son mari. Témoins, les échanges qui se développent. La poterie sigillée originaire dArezzo en Italie est désormais produite sur place à Banassac.

Puis à nouveau déstabilisation sous l'effet de deux nouveaux  facteurs : la propagation du christianisme et les invasions « barbares » (CAD  les étrangers à l’empire) dès le II siècle. Le premier évêque de Rome envoie 7 pasteurs aux quatre coins du monde connu. Austremoine, un érudit grec,  arrive à St Flour vers 250/251 pour évangéliser l'Aquitaine. Un diacre,  St Privat, installe une communauté à Javols. Il n’en demeure pas moins que les rites païens restent toujours très vivaces et que les empereurs sont  fortement hostiles au nouveau culte chrétien : celui-ci n'accepte aucun syncrétisme et prêche la non violence. Les empereurs de l'époque ( Gallien et Valérien), menacés par les crises intérieures et les déferlements barbares sur les limes( frontières romaines) préfèrent de beaucoup que la soldatesque sacrifie à Mythra, dieu solaire conquérant et guerrier.  Il le faut car les hordes germaniques s'abattent régulièrement sur les frontières de l'empire romain. Elles déferlent à présent par nos contrées moins fortifiées que la vallée du Rhône pour atteindre Rome et le cœur de l'empire. C'est à ce moment là que se situe l'épisode du sacrifice de St Privat pour sauver la population de Javols réfugiée dans la forteresse de Grèzes assiégée par un certain Crocus 259/260. La destruction de Javols et l'inhumation de l'évêque martyr à Mende annonce le futur transfert de l'évêché vers cette cité en pleine expansion. Cet événement, largement repris par Grégoire de Tours au VI siècle, eut certainement beaucoup de résonance dans les mentalités et contribua à développer les pèlerinages et à fortifier le christianisme dans les vallées hautes comme la nôtre.

Le Gévaudan sous l’empire romain chrétien. A partir de 311 l'édit de Galère sous Constantin met fin aux persécutions et  permet  la propagation en plein jour du christianisme. L’Eglise gabale est mentionnée présente à un concile qui eut lieu en 314 à  Arles. Le paganisme recule dans les campagnes et s’accompagne parfois de la destruction d’anciens sanctuaires et de la réutilisation de leurs matériaux. Lors des travaux de restauration de l’église St Pierre( 1983 à 1987), l’assainissement intérieur et extérieur a permis de découvrir sous le pavage des fondations très anciennes qui nont pas fait l’objet de fouilles approfondies : ancien sanctuaire, église paléochrétienne ?

Dès 406, les invasions reprennent. Les Wisigoths se stabilisent dans notre région en 416 (prise de Rome en 410 par Alaric). Dans les débuts, les Wisigoths, chrétiens ariens, signent un accord et se soumettent loyalement à l'autorité impériale: les droits et coutumes sont appliqués à chacun selon son origine cultu- relle : droit romain, code d’Euric. L’arrivée des Barbares marque le début de la lente évolution de l’esclavage vers la servitude. Les Wisigoths, aux mœurs plus fraternelles, tempèrent les relations so- ciales. Ce qui a pour conséquence de séduire les masses. Sidoine Apollinaire, évêque de Clermont, conscient de la perception négative que laisse l’aristocrate romain souvent dépravé et esclavagiste, cherchera à endiguer et à résister face à ce double danger politique et hérétique. Mais les puissantes familles gallo- romaines au pouvoir ne sont pas soutenues par l'empereur Julius Nepos lui-même en graves difficultés. Il négocie l'abandon de l'Auvergne en 474 au roi wisigoth Euric, Sidoine est interné à Llivia. L'empire romain s'effondre peu après en 476. La domination des Goths sera de courte durée. En 507 après la victoire de Vouillé, le pays tombe aux mains du roi des Francs,  Chlodowich ou Chlodovechus (Clovis), qui signifie "célèbre par ses combats". Le Languedoc  seul restera  wisigoth  jusqu’en 759 et ne sera intégré au domaine royale qu’en 1215. La frontière passe sur la crête du Mt Lozère.

Pendant 300 ans, le Gévaudan est sous domination mérovingienne, c'est à dire sous l'influence de la culture franque, romaine et du catholicisme d’état instauré par le baptême de Clovis à Reims. Désormais le roi nomme les évêques et quand il ne retient pas une proposition du clergé, l'évêché reste sans tête. Cette intrusion a pour conséquence la création de nombreux monastères, véritables refuges pour les hommes de foi et centres de vie des paroisses locales.

De leur coté, les grands féodaux montrent par les armes leurs appétits de terres et d’honneurs. Ils guerroient sans cesse contre de nouveaux envahisseurs, normands à l’ouest, sarrasins au sud, ou contre des pilleurs de monastères. 

Dès 987 la renaissance carolingienne se heurte à ces grands feudataires . La réforme administrative de Charlemagne découpe lempire en comtés et vigueries (baronnies) sous l’autorité d’un comte ou d’un vicomte et de viguiers (ou barons).  Allenc dépend du vicomté de Gévaudan. On dénombre 8 vigueries dans le pays gabalitain: Banassac, Grèzes, Miliac (près de langogne), Valdonnez (le haut Lot), Chassezac, Vallée du Tarn, Dèze et la vallée longue, Vallée-Française. 

Après le partage de lempire ces comtés glissent vers le système féodal. Les grands feudataires locaux renforcent leur patrimoine et leur hégémonie par mariage ou acquisitions, les charges deviennent héréditaires. C’est par ces multiples transactions que les chevaliers, barons et vicomte en viennent à rendre  hommage au roi dAragon en 1172.

Parmi ces seigneurs,  pointons la lignée des chevaliers dApchier devenus barons au retour des croisades( 1096). La dernière descendante, Alix dApchier porte la baronnie dApchier à un Guérin de Randon vers 1150, 1165. Ils ont deux fils, Odilon et Guérin. Puis un Garin dApchier, est mentionné seigneur du Tournel au XII siècle, grand amateur de poésie et défenseur des troubadours (voir les travaux de S.STRONKI).

C’est ainsi que les terres dAllenc sont partagées entre les seigneurs de Randon et du Tournel, descendants, frères ou cousins, issus des Randon dApchier. Ils y entretiennent une forteresse. Les barons sécurisent les axes muletiers et prélèvent des droits  en échange de cette protection. Un réseau dense de maisons fortes  aux mains  de chevaliers  relaie l’autorité du baron : La Prade, Larzalier, Le Mas Renouard, Le Villaret.Autre fait important pour comprendre ce que vit la population en cette rude époque : l’âpre lutte que menèrent au XII et XIII siècles les évêques comtes de Mende contre le roi dAragon,  puis contre quelques puissants barons locaux au profit de l’autorité de l’Eglise et du pouvoir royal. En 1161, la bulle d’or, (dite bulle d’Orem) confère au comte évêque du Gévaudan en son fief  les pouvoirs du roi Louis VII en matière de police, de fiscalité et de justice, même si l’hommage est toujours rendu au roi dAragon. Cette lente reconquête s’appuie sur un vaste mouvement de régulation sociale « La paix de Dieu ». Fief après fief, les points névralgiques de la vallée du Lot sont  repris en mains.  Si bien qu’en 1258, le Gévaudan entre complètement sous la suzeraineté de Philippe Auguste. 

Autre élément important, les croisades. Elles coutent chers aux seigneurs : l’entretien d’une église et d’un curé deviennent pesants mais indispensables pour contenir la paix sociale. Souvent, ceux-ci préfèrent en faire don à l’Eglise : cela sauve leur âme et rééquilibre leur trésorerie. Les terres de lévêque s’étendent au dépend des terres des barons et bénéficient d’une fiscalité allégée. Pour faire le point sur le patrimoine de l’Eglise, le pape Calixte II commande des cartulaires aux ordres qui dépendent directement de lui : Clunisiens, Victorins et Hospitaliers.  Sur le cartulaire du chapitre de Mende en 1123 figure l’église St Pierre dAllenc, son prieuré, sa maison claustrale et ses terres. Des moines du chapitre y assurent le service religieux.  En 1237, le chapitre de Mende abandonne la vie régulière et désigne un curé et un vicaire ainsi que des chapelains à Allenc.

A la même époque, la servitude se transforme peu à peu en servage : le corps du serf ne dépend plus de son seigneur, mais seulement une partie de son travail et de ses revenus ; il devient tributaire d’un noble ou d’un clerc à qui il doit les services d’ost, dîme, corvées, redevances sur les moulins et fours banaux, etc... 

Enfin, l’autarcie relative de ces  siècles féodaux a renforcé la langue locale répandue par les troubadours.  

Donc pour résumer et jusqu’à la Révolution, les allencois sont tributaires selon les terres qu’ils exploitent (tenures ou menses) soit des seigneurs du Tournel et de Randon, soit directement du comte-évêque, avec toutes les nuances de conditions et de traitements que cela entraine (Pour plus de détails sur la répartition des pouvoirs et des villages d’Allenc, voir les travaux de l’abbé Remize). Cette triple conjoncture fera d’Allenc une seigneurie plus importante que les autres : 8 barons et 12 chevaliers siègent aux Etats du Gévaudan dont un chevalier pour  Allenc seul. 

Au XIV siècle le pape Urbain V, Guillaume de Grimoard  issu de la petite baronnie de Montferrand au sud de Mende, dispense largesses et soins à l’entretien de l ‘Eglise du Gévaudan. Peut-être peut-on lui attribué l’agrandissement de la nef de l’église dAllenc, Mende en tout cas voit ériger  sa magnifique cathédrale dédiée à Marie.

La lutte entre Armagnacs et Bourguignons et les exactions des Grandes Compagnies de Routiers touchent notre territoire (mort de Du Guesclin à Châteauneuf de Randon), la peste décime un quart de la population ( 1348) et le Grand Schisme divise les catholiques entre Gallicans et Ultramontains. Suit un XV siècle relativement stable et favorable au développement économique : la production drapière de Mende en plein essor dynamise l’arrière pays fournisseur de laine. Les esprits se calment : les conciles de Constance et de Bâle promulguent une série de canons pour affermir l’autorité du pape et amorcer une profonde réforme spirituelle nécessaire en ces temps de simonie, de sorcellerie, d’ésotérisme et d’occultisme. (Jean Gerson, Jacques dAmboise, Jean Standonk en sont les maitres d’œuvre). 

Quelques éléments architecturaux  rappellent cette  prospérité, on parlera plus tard de « Renaissance » en général. L’église St Pierre se pare d’un mur clocher assez proche de l’actuel et de nouvelles chapelles et le Couderc, ou foirail du village, d’un calvaire monumental de prestige formé de 3 croix en pierre (la croix fleuronnée conservée dans l’église pourrait être celle d’un des fûts).

Trop beau pour que cela dure : au XVI siècle la guerre civile est à nos portes.  Avec la réforme calviniste, le Gévaudan est coupé entre catholiques et protestants. Le versant nord du Mt Lozère et la haute vallée du Lot conservent la foi catholique. 

C’est une guerre descarmouches sanglantes, violentes, qui demande beaucoup d’argent aux deux partis, les Calvinistes contre les Ligueurs. On prend une ville ou on l’assiège, on demande une rançon ou on la détruit. François  de Cardaillac, héritier du Peyre et protestant, est invité aux noces du futur Henri IV à Paris le jour de la St Barthélémy, 25 août 1572. Il y est assassiné. Mathieu Merle devient le régisseur de la forteresse et de là il va pouvoir venger son seigneur et terroriser le comté. 1579-1580 il occupe le château dAllenc  repris après un long siège par le seigneur de Randon. L’église est en partie détruite.

Pour éviter la reprise de la forteresse dAllenc,  les Ligueurs ordonnent la destruction du château. Les villageois, usés par ces violences, en profitent pour récupérer les matériaux qu’on retrouve dans certaines maisons en granit du village.  Pour fidélité rendue à la Ligue, la seigneurie dAllenc prend le titre de baronnie et obtient  du roi son droit d’entrée aux états généraux du Languedoc en 1583. La maison forte qui émerge aujourd’hui des toits du Mas est une ancienne auberge construite au XVIII à l’emplacement de la place forte.

Par la suite, la reconstruction de l’église est baclée.

- 1607- 1610: le mur sud est remonté avec un dénivelé inférieur de 50cm par rapport au mur nord. La voute menace de s’effondrer. » N’ayant plus de cure, le curé d’Allenc de 1626 à 1661, Antoine Richard, habite au Mas Renouard (dans la moitié de la maison Arzalier qu’il fit rebâtir , sur la porte d’entrée on lit  « impleat dominus domum hanc benedictione A.Richard parocho 1628 », que le Seigneur remplisse cette maison de ses bénédictions) . Son neveu et successeur de 1664 à 1700 , un autre Antoine Richard, fit de même. » ( AB.Remize)

La Guerre de religion a laissé des cicatrices profondes  dans la mémoire des habitants. La motivation et laferveur religieuse sont entamées. La population lassée montre sa désaffection au projet de reconstruction.  Durant le XVIII siècle, le retour à l’unité et à la reconquête des esprits devient la priorité de La Réforme catholique.

En même temps, l’ordre du clergé défend âprement son indépendance fiscale face aux besoins énormes du Trésor Royal qui doit financer les  « guerres de Successions » menées contre lAutriche et l’Espagne. Mais il perd peu à peu du terrain et les subsides sont consacrés au plus pressé.  La réforme touche essentiellement le caritatif.

Création des congrégations à Mende sous l’impulsion de St Vincent de Paul et de Bérulle. En cas de mauvaises récoltes, le chapitre de Mende accepte de réduire les redevances sur Allenc et donne une aumône au curé pour aider les pauvres et les malades de la paroisse. Sur un document sans date mais du XVII s, on dénombre sur la paroisse dAllenc 245 très pauvres et 236 à aider temporairement. (archives dép.)

- 1709: reconstruction de la façade et adjonction d’une cure entre les deux contreforts sud là où il n’y a pas de fenêtre en plein cintre.

- 1720-1721 :Arrêt des travaux pendant la peste 

- 1721-1722: Jean Rocheton peint les fresques du tétramorphe sur les voutes de l’église.

- 1729: effondrement de la cure

- 1776: remplacement de la cure par le bâtiment actuel. (date sur la porte d’entrée.)

- 1777: construction de la sacristie.

La population n’entend plus se mêler des travaux et attend de l’évêché la collecte des fonds pour lanconsolidation de l’ensemble.

-1789, fin de lAncien Régime : la Révolution est en marche. Le village semble d’abord adhérer à la dynamique révolutionnaire. La masse souffre du système féodal resté en vigueur et des seigneurs gourmands comme l’état. La pression fiscale est à son comble et les récoltes mauvaises. Des nobles, des bourgeois mais aussi des prêtres, proches des difficultés quotidiennes de la population et ouverts aux Lumières, dénoncent les privilèges de la noblesse et du clergé. Dans l’ensemble, le Gévaudan porte aux Etats Généraux de 1789 des représentants modérés, protestants ou catholiques, soucieux de justice.

Dès après le 14 juillet, la Grande Peur terrifie les populations. La tension monte. Les choses se dégradent à partir de la Constitution Civile du Clergé , 12/07/90, rendue obligatoire le 20/11/1791 ce qui met le feu au poudre. Éloignés des réalités locales, les idéaux et le souffle révolutionnaire des parisiens n’évaluent pas les conséquences nées de la précipitation de cette réforme sur le Gévaudan devenu département de la Lozère.  

La dynamique révolutionnaire positive laisse place au retour de la dynamique des guerres de religion: on frôle la guerre civile. Seulement 6% des prêtres prêtent serment. La mobilisation populaire dans les terres catholiques du Nord de la Lozère fait bloc autour des réfractaires véritables hors-la-loi et clandestins. En effet, leur protection et défense recoupent celle des intérêts familiaux dont ils sont issus, nombreux sont les prêtres et les religieuses sortis de nos villages.. La république réagit rapidement et fait revenir l’ordre sans ménagement. Simultanément attaquée par la coalition des monarchies européennes, la Convention impose une levée de 300 000 hommes pour combattre la réaction et  préserver la république (2082 lozériens). Le Comité de Salut Public prescrit la récupération des métaux sur tous les biens nationaux en avril 1794. L’église est pillée de son argenterie. Les cloches disparaissent… fondues sans doute pour les canons de l’armée révolutionnaire. Une rumeur dit qu’elles auraient été cachées dans le lit de la rivière. Les croix sont saccagées. Le mur clocher ne sera reconstruit qu’en 1828. Le 6 juin 1794, Allenc, devenu un des 8 cantons du district de Mende, lève une garde nationale,  soit 300 gardes pour conjurer les troubles. Une forte tension règne.  Jean Peytavin, cultivateur et maire dAllenc, fera partie du Comité de surveillance du district. Il défendra le curé, Augustin VIDAL qu’il fera sortir de prison. Réincarcéré, les femmes du village se mobiliseront à nouveau pour sa libération.(voir Abbé Remize). Le retour au calme sera scellé avec la signature du Concordate de 1801 qui ramène la paix religieuse.

La révolution s’opère à tous les niveaux. Les biens de l’Eglise et de la Noblesse deviennent Biens Nationaux et sont vendus par adjudication aux  bons citoyens dAllenc et aux plus fortunés.( détails chez Remize)

Fin XVIII et début XIX siècles, les moulins banaux sont rachetés ( Moulin de La grave, de La Valette) et des meuniers ont enfin le droit d’édifier leur propre moulin sur les petits cours d’eau de lAlignet et de La Valette. Le moulin dit du  « Ceset » au Mas Planty a été très important et fournissait en farine les trois boulangers dAllenc qui cuisaient pour plus de 1300 habitants vers les années 1800. D’autres moins importants écrasaient  la farine pour les animaux à l’aide d’une meule de pierre en tronc de cône qui tournait à l’intérieur d’une cuve : orge et noix. C’était le  « Moulin de L’ase ou du Tiret » en souvenir de l’âne qui tirait les fardeaux.

Enfin, la révolution industrielle pénètre nos villages avec la ligne de chemin de fer du « Translozérien » 1884/1902 qui relie le Monastier à La Bastide St Laurent . (voir réf bibliographique et site du Translozérien) 

Bouleversement des pratiques agricoles et des paysages ruraux : développement de la filière « Bois ». Dans la mentalité du montagnard de cette époque, la forêt est un espace non exploité, refuge, qui plus est, d’animaux nuisibles (loup). La défricher, empêcher les arbres de repousser, convertir cet espace inutile en prairies qui permettront d’augmenter le cheptel, c’est œuvrer pour l’économie et même la civilisation. On sait à quelle désertification des massifs cette vision des choses a conduit et combien le reboisement qui ne pouvait être rentable que globalement et à long terme a été difficile à faire accepter par les populations locales.( In Situ, revue du Patrimoine n°8/2007)

Changement de cheptel : les ovins régressent au profit des bovins grâce à lacheminement plus rapide des dérivés des produits laitiers et en raison du reboisement massif.

Reprise de l’extraction minière : La société métallurgique et minière des Cévennes a été fondée en 1894 sous forme d’une société anonyme au capital de 600.000 francs en 1.200 actions de 500 francs par M. Eugène Sénéchal de la Grange, banquier à Paris. Les co-fondateurs de l’entreprise sont Robert Forget[ (Paris), Joseph Chapat (Allenc, Lozère) et Vincent Garrigou (Allenc), chacun d’eux obtenant 5.000 parts de fondateur. A l’origine il s’agissait pour la société d’exploiter les gisements de plomb dAllenc pour lesquels la société obtiendra une concession en 1898. La ligne n’étant pas achevée, cet exploitant se retire après condamnation par l’état pour non valorisation du sous-sol.(Minerais de plomb argentifère. : gisements dans le lias, les dolomies infraliasiques et le granite.  Galerie Eugénie,  Galerie Jeanne au Mas Planty.  La Galène est à larges facettes et de qualité, (Plomb Argent 65,30 p. 100).

Bouleversement démographique : l’exode rural massif vide Allenc : 1710 habitants en 1836, avec un pic négatif à 232 habitants en 2009 point de départ d’une très faible croissance.

Enfin, les écoles communales sont construites dans nos villages, les filles iront principalement chez les sœurs au couvent de la Croix de Comte. Construction au Puech (1878-1879), réparations et fonctionnement (1887-1930) ; construction d'écoles au Mazas, à l'Altaret et à l'Arzalier (1881-1929) ; école le l'Altaret : construction (1881-1889), réparations et fonctionnement (1903-1932) : de l'Arzalier : construction (1881-1887), réparations et fonctionnement (1902-1928) ; du Beyrac : appropriation d'une maison et reconstruction (1873-1889). réparations et fonctionnement (1897-1932) ; du Mazas : construction (1881-1886), réparations et fonctionnement (1932) (Archives départementales c 2.0.101).

En 2015, il n’y a plus aucune école à Allenc.

En 1854, Allenc cède à la commune de Châteauneuf-de-Randon les sections de Laubert et de Montbel. L’eau potable est assurée par l’entretien des fontaines : Fontaine du bourg : construction (1900) ; de L'Altaret : réparations (1900-1932) ; de l'Arzalier : construction (1900-1904), réparations (1931) ; de l'Arzalier et du Mazas : réparations (1928) ; du Beyrac :construction (1922-1923) : du Mas-Pouget : construction, réclamations (1897- 1901) ; du Mazas : répa- rations (1930) ; de La Prade : construction (1907-1934) ; du Puech : construction (1897-1898), réparations (1902-1939) ; des Salelles : réparations (1896) ; de Veyrines : construction (1928). - (1890-1939)  Archives D.Cotes : 2 O 104.

Il faudra attendre 1962 pour que l’eau courante à domicile arrive chez tous les habitants. L’électrification est aussi lente : entre 1920 et 1930 (voir site de SDEE).« 14/18 , 39/45, guerre dAlgérie : nous sommes en Lozère, la ligne de front est à plusieurs centaines de kilomètres ! mais on retrouve dans l’église St Pierre la longue liste des morts pour la France gravée sur une plaque commémorative.

Quelques épisodes en retracent le souvenir : après l'année 1916 où de réelles difficultés d'approvisionnement en munitions se font sentir, l'arrivée de Pétain a permis de remettre les choses en ordre. Conséquence à la fin du conflit, la France se retrouve avec des quantités de munitions considérables.

En 1922 la Poudrerie Nationale de Toulouse propose le site de Charpal, pour la construction d’un barrage. Une bifurcation à la ligne  du translozérien d’une quinzaine de kilomètres est construite entre Larzalier et la forêt domaniale de Charpal. Les travaux durent de 1925 à 1934, et emploient jusqu’à 2000 hommes. Les hivers sont rudes dans cette région, la chaux durcit et il faut la concasser pour l’utiliser, ce qui donnera des maçonneries de piètre qualité. Les travaux sont abandonnés par sécurité. Cette voie ferrée, disparue aujourd’hui, culminait à 1388m, pour arriver au niveau du barrage à 1330m. Elle sera démontée en 1938. (www.memoire-et-fortifications.fr)

Depuis 2006, le réseau Internet ne cesse de s’améliorer et tous les hameaux y ont accès depuis 2013. Les habitants d’aujourd’hui veillent attentivement aux nouvelles actions politiques nationales et européennes visant au développement durable de la moyenne montagne. Nouveaux enjeux et nouveaux potentiels restent  à découvrir pour valoriser la  commune de demain au sein de nouvelles coopérations territoriales. Mais ce qui fait  son unité subtile est cette étonnante capacité d’absorption des influences tant méridionale que  septentrionale.

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